Ils sont jeunes, ils sont beaux, ils sont développeurs indépendants et ils sont français. Ne reste plus que le succès pour leur jeu eShop Monkey Pirates, à venir incessamment sous peu (fin avril, début mai nous souffle-t-on dans l'oreillette) et ils seront en plus certainement heureux. Mais pour le moment, réjouissons-nous surtout qu’ils soient assez disponibles pour prendre le temps de répondre à quelques questions.

Bonjour les Henchmen et merci de prendre du temps pour cette INTERWiiU. La première chose qui fait tiquer en consultant vos profils LinkedIn – vous êtes un studio de 5 personnes si je ne me trompe – c’est que 4 d’entre vous ont fait un passage chez Ubisoft, avec un en particulier (je ne cite pas de nom, qu’il se dénonce s’il l’ose) ayant même travaillé sur WiiU avec le jeu qui allait devenir ZombiU plus tard et s’intitulait encore à l’époque Killer Freaks from Outer Space… Vous êtes-vous tous rencontrés à Ubisoft et est-ce là qu’est née l’idée de fonder votre propre studio indépendant ?

[Christophe Siccardi] Pas tous, mais pas loin. Alex, Brice et moi on s’est rencontrés à Ubi Montpellier. C’est une fois le projet pitché et les premier prototypes faits qu’on nous a présenté Kuru, et c’est là qu’on a appris qu’on avait tous travaillés à quelques mètres les uns des autres au même moment. Quant à Valentin, c’est au MIG (Montpellier In Game) que l’on a fait sa connaissance, grâce à un disque de démo qui nous a mis une belle claque. Avec Alex on était dans la même équipe de développement d’Ubisoft et on est devenu amis. Plus tard, on a décidé de se lancer dans quelque chose de plus personnel.

Sur quels jeux avez-vous travaillé avant de fonder Henchmen Studio, quels sont vos parcours ?

[Alexandre Brissac] Je suis rentré chez Ubisoft Montpellier direct en sortant des études en tant que programmeur outils, je n'ai pas travaillé directement sur les jeux mais sur l'éditeur qui permet de les développer. Du coup j'ai de près ou de loin travaillé sur Red Steel 2, Les lapins crétins la grosse aventure et Tintin. Après Ubi, je suis parti pendant 1 ans chez Quantic Dream ou j'ai travaillé sur Beyond : Two souls.

[CS] Pour ma part en sortant d’étude j’ai été pris en stage chez Ubi Montpellier où je suis resté un peu plus de 2 ans. Après un passage à Ubisoft Barcelone, je suis revenu en France pour monter Henchmen Studio. J’ai bossé sur Les lapins crétins la grosse aventure, Michael Jackson the Experience et Tintin.

Est-ce l’envie de devenir indépendant qui a aboutit à Monkey Pirates ou l’envie de faire Monkey Pirates qui vous a mené sur le chemin de l’indépendance ? L’oeuf ou la poule ? La pilule bleue ou la rouge… ?

[CS] Question sympa ! Je dirais l’envie de faire un projet qui nous ressemble dans lequel on se sente impliqués. Être dans une grosse boite veut souvent dire jouer son rôle et pas plus. Là c’était l’occasion de s’envoler seuls, d’apprendre tout en prenant des risques, certes, mais d’en sortir fort d’une expérience complète qui nous est forcément bénéfique et qui nous permettra, on espère, de continuer sur cette lancée.

Sur la page Steam Greenlight de Monkey Pirates, dans un de vos messages vous citez Mario Kart et Micro Machine en évoquant ce que vous recherchez à restituer comme expérience de jeu. En quoi ces titres sont-ils des références dans votre démarche ?

[CS] Notre démarche était de faire un jeu qui nous faisait envie. Comme nous sommes tous issus de cette génération de joueurs qui a connu les jeux multijoueurs offline sur le même écran et que de très bon souvenirs en sortait, nous avons décidé de nous orienter vers ce modèle. Aujourd’hui même les jeux de voitures ne sont plus jouables en offline avec des amis, il ne reste que les jeux de combat et de sport, alors que personnellement ces jeux représentent un bon morceau de mes meilleurs moment de joueur.

Et justement, quel est votre rapport à Nintendo et comment s’est présentée la possibilité de porter votre jeu sur WiiU, qu’est-ce qui vous a décidé à le faire ? Nintendo a t-il été réactif lorsque vous les avez approché ?

[CS] Nintendo fait partie entière de ma vie de joueur. Première console, licences marquantes et clairement Monkey Pirates s’inscrit à merveille dans la ligne éditoriale habituelle d’un jeu Arcade/Party d’une console Nintendo. Une fois le jeu fini nous nous sommes rendus compte que nous avions fait un jeu console plus qu’un jeu PC, c’est donc naturellement que nous avons contacté les consoliers à un moment ou la One et la PS4 n’étaient pas encore sorties. Nintendo fut très réactif, et surtout très sympa. Ce fut tout de suite très simple et ils ont tout fait pour nous aider : prêt de Kits de développement, modification de certaines clauses de contrats qui avaient des exigences de grandes entreprises etc... Nous avons ouvert des portes pour les indés et petites équipes dans des procédures qui étaient faites pour de grosses structures. De fait cela nous a donné envie de nous impliquer.

Alors qu’en raison de ses faibles ventes la console peine sur le front des AAA d’éditeurs tiers, les annonces de projets indépendants à venir sur WiiU peignent une toute autre situation du côté de l’eShop, avec des annonces régulières : quelle en est la raison selon vous ?

[CS] L’ouverture est faite, Unity (ndr : moteur de développement multiplteforme très populaire) a une version WiiU finale qui permet a tous de développer des jeux sur cette console de salon, et le prestige de sortir sur une console Nintendo est bien là. Après, il ne faut pas perdre de vue que pour le moment une place sur l’eShop a beaucoup plus de visibilité qu’une place sur Steam ou sur l’Apple Store. N’oublions pas non plus que si la console est boudée par les gros éditeurs en raison de ses faibles ventes, c’est une raison qui n’est pas autant valable pour les petits studios qui ont besoin d’un nombre de ventes nettement moindre afin d’être rentables.

Comment s’est déroulée la GDC 2014 ? Vous avez été invité par Nintendo

[CS] Oui! Quelle chance, je n’en reviens toujours pas. Une autre preuve de la gentillesse de Nintendo et des portes qu’ils nous ouvrent. La convention s’est déroulée à merveille et nous avons passé un très bon moment a montrer Monkey Pirates. Ce fut aussi l’occasion pour nous de voir ce qu’avaient préparé les autres studios et certains jeux sont très prometteurs. Je pense que ce Lineup Nintendo eShop / Unity va être très intéressant et diversifié!

Pour en revenir à Monkey Pirates, pourriez-vous nous donner des détails sur le contenu et les modes de jeu ? Du multi local & en ligne… ?

[CS] D’abord je crois qu’il est bon de rappeler que finalement Monkey Pirates sera une exclusivité Nintendo WiiU. C’est un jeu multi-joueur donc, basé sur des combats navals en arènes. Il y a une dizaine d'arènes réparties dans 4 univers principaux (Egypte, caraïbe, chine et arctique). Dans chaque univers il y a des éléments perturbateurs spécifiques, respectivement des téléporteurs, des volcans, des tourbillons et des icebergs. Au milieu de ces arènes flottent des bonus de différentes sortes qui permettent soit de mieux armer son bateau (mines, boulets de feu, etc… ) soit de booster ses capacités (armure, vitesses etc…), soit d’influer sur la partie en cours (changement de vent, inversion des commandes, etc…). En tout il y a 15 bonus et on peut choisir les bonus qui seront disponibles pour la partie en cours. 

4 modes de jeu sont disponibles dans Monkey Pirates :
- Le mode à l’abordage : un “free for all” classique où l’on s’affronte jusqu’à la fin du chronomètre.

- Le mode pavillon noir : le premier à couler un autre joueur devient le pavillon noir, il ne peut plus ramasser de bonus mais inflige 2 points de dégâts. Il marque des points au plus il garde le pavillon noir. Le match se termine une fois qu’un joueur à atteint le score limite.

- Le mode course aux bananes : Des coffres à bananes apparaissent aléatoirement sur la carte, il faut les collecter. Si vous mourez vous laissez sur place toutes vos bananes. Le gagnant est celui qui a le plus de bananes à la fin du temps.

- Enfin le mode Roi des Mers : ce mode de jeu offre la possibilité à un 5éme joueur de se joindre à la partie en utilisant le WiiU gamepad. Il possède ses propres objectifs et interfère avec la partie qui se déroule entre les 4 autres joueurs.

Il n’y a pas de multi en ligne dans Monkey Pirates, en revanche nous avons développé un système d’intelligences artificielles afin que les joueurs profitent toujours d’une partie remplie. De fait vous pouvez donc jouer seul contre 3 IA, mais c’est toujours plus sympa avec des amis bien sûr !

Visiblement, les bonus donnant des capacités particulières ou déclenchant des évènements en jeu influant sur les conditions de la partie, ont une importance particulière : pouvez-vous nous décrire un peu plus cet aspect du jeu ?

[CS] Bien sûr, il existe 15 bonus différents dans Monkey Pirates. Certains améliorent les navires (armures, boost, rames pour ne plus prendre le vent en compte, etc…) d’autre armes les bateaux (tir en éventail, tir de bordée, mines, etc…) et enfin il existe des bonus dits spéciaux qui influent sur tous les joueurs. Ils sont là pour vous surprendre et changer le court d’une partie en ajoutant de la perturbation. Par exemple supprimer les bonus de tous les autres joueurs, ou inverser les position de chacun à l’écran, mais je vous laisse la surprise de certains...

Quelle est la résolution et le framerate du jeu ? Avez -vous rencontrés des difficultés particulières à porter votre code sur WiiU ?

[CS] Le jeu tourne en 1080p à 30 fps ou plus. Comme nous utilisons Unity pour WiiU nous n’avons pas eu de difficultés, Unity a rajouté des entrées à leur API script permettant de faire appel aux fonctions de l’API de Nintendo. Du coup en code spécifique WiiU nous avons surtout travaillés sur l’interface, la gestion des différents contrôleurs, de l’optimisation afin d’avoir un jeu fluide et le mode Roi des Mers.

Peux-tu nous donner quelques détails sur le choix de l’exclusivité WiiU ? Il me semble qu’au début votre projet était aussi prévu sur PC… ?

[CS] C’est vrai, mais comme je l’ai dis plus haut, nous avions fait un jeu console et pour sortir sur PC nous devions passer par la fameuse étape Greenlight. Or nous n’avons pas su trouver notre public sur Greenlight. Du coup nous avons rebondis, PS4 et XBox One n’étant pas encore Unity compatibles, nous avons préférés jouer le jeu à fond avec Nintendo qui à tout fait pour nous plutôt que de forcer une vente sur PC en dehors de Steam, ce qui amenuise encore les probabilités de ventes.

Quelque chose de particulier à dire n’ayant pas été abordé ?

[CS] Oui, vous remercier, car au final c’est ça le plus dur… Trouver des gens pour parler du jeu, faire en sorte de toucher le plus de gens possible. Merci aussi à ceux qui prennent le temps de nous lire. Pour rester informé des activités du studio, vous nous trouverez sur Facebook et Twitter.