Bayonetta. Ce jeu me faisait de l'oeil. Et pas seulement parce qu'on incarnait une MILF sexy aux jambes désespéremment (trop) longues et au fessier remarquablement mis en valeur. Je sentais qu'il y avait un truc. Je n'ai jamais pu tester Madworld mais les p'tits gars de Platinum sont pas du genre à faire les choses à moitié. Une promo sur un site anglais, une petite commande et hop! Une semaine plus tard, il m'attend sagement à la Poste (parce que le facteur n'a toujours pas compris comment rentrer un colis dans une boîte aux lettres...).

Vu les avis que j'ai vu ici et là, je décide de commencer le jeu en Facile (oui, honte à moi), histoire de me chauffer, car je sais que je perds très vite patience (Street Fighter IV et un certain Seth auront eu raison de moi). Premier sourire: la tombe d'Hideki Kayima se fait pisser dessus par un des personnages après l'intro. Ok, ce pied de nez va me rassurer dès les premières minutes. Pourtant, ça mettra du temps. Le jeu commence, j'enchaîne les combos dans le cimetière assez facilement et je prends le coup de main avec le système d'envoûtement: une pression sur la touche d'esquive au bon moment permet d'éviter l'attaque ennemie et d'arrêter le temps afin de pouvoir foutre quelques tatanes dans sa tronche. Une touche pour les flingues, une autre pour les coups de poings, et une troisième pour les coups de pieds. Classique mais efficacement WTF.
C'est même trop facile: la barre de vie est gigantesque, les attaques adverses ne font pas grand chose... Après deux ou trois chapitres, je décide de recommencer en normal, histoire de faire les choses biens. Et là, ça change du tout au tout: la barre de vie est réduite au minimum mais agrandissable grâce à des morceaux de coeurs de sorcière (merci Zelda). Les combos s'effectuent de manière plus subtile aussi. On use des touches de directions pour faire des attaques spéciales, et enchaîner les combos de bien belle façon. Mais certains enchaînements ne se font qu'en appuyant sur une succession de touches après un timing bien précis. En gros, après un coup, il faut laisser un court temps d'attente avant d'appuyer de nouveau sur une touche, ce qui donne un combo bien différent et forcément plus dévastateur!

Cette petite subtilité n'a l'air de rien mais participe grandement à la richesse du gameplay. Les petits timings de combos s'effectuent plus facilement en envoûtement, et certains ennemis ne se laisseront pas faire si on enchaîne les coups sans relâche. Chacun a sa manière de combattre et d'esquiver, et il faut faire preuve d'observation si on ne veut pas voir sa barre de vie diminuer aussi vite que les vêtements de Bayonetta disparaissent. Surtout que la technique d'esquive se marie vraiment bien avec les coups et on peut l'enchaîner quand on veut sans pour autant arrêter la frénésie du combat.
C'est d'ailleurs un autre point du système de combat, décidemment impeccable. En dessous de la barre de vie de la sorcière se trouve une jauge de magie, qu'elle fera grimper en éclatant des monstres. A un certain seuil, elle aura la possibilité de faire des "attaques sadiques" complètement WTF en appuyant sur deux touches en même temps: échafaud, cheval d'arçon aiguisé (très "bondage", typiquement japonais d'ailleurs...), tronçonneuse... C'est du délire, c'est trippant, et ça atteint son paroxysme face aux boss ou autres gros ennemis avec les "apothéoses", où Bayonetta se met à nu (littéralement) pour transformer ses cheveux en créatures démoniaques qui éclatent la tronche à l'ennemi, essayant de fuir tant bien que mal...

A tout ça on peut ajouter le fait de récupérer certaines armes ennemis, qui ne dureront qu'un temps mais qui font très mal et varient agréablement le combat. On aura aussi tous les accessoires disponibles dans les magasins, qui vont des artefacts pouvant repousser les attaques adversaires avec le bon timing et avoir une sorte d'envoûtement encore plus long que l'original, à l'invocation de petits lutins qui lutteront à vos côtés. J'oublie aussi les armes bien à elles qu'elles pourra greffer à ses bras ou jambes. Katana, griffes ou pistolets-fusil à pompe, on pourra créer deux configurations d'armes pour les changer d'une simple pression sur la gâchette en plein combat. Malin.

Si Bayonetta prend tout son sens en Normal, il faut savoir aussi que beaucoup d'éléments ne sont accessibles que dans ce mode. Comme si Platinum voulait proposait un mode Facile tout en récompensant les joueurs se lançant dans le mode Normal. En autre, on trouvera les portails d'Afheim (ça doit pas être le bon orthographe, et je m'en excuse) bien cachés dans les niveaux. Ce sont des petits défis, généralement bastonner des ennemis suivant certains paramètres, qui donneront des bonus et autres joyeusetés. Il y a pas mal de choses à trouver dans le mode Normal, bien plus gratifiant.

On parlera aussi du personnage de Bayonetta. Cette sorcière vicieuse ne brillera pas par sa profondeur (le scénar' n'est pas un modèle de complexité mais a le mérite d'exister) mais surtout pour les affrontements contre les boss, où elle n'hésitera pas à les tiquer quand ils se lancent dans de gros monologues ennuyeux ou à se foutre de leur tronche à la moindre occasion. Ajoutez à ça des cinématiques complètement WTF, et vous obtiendrez un beau gros bordel bien fun et bien jouissif.
Et c'est un des points à souligner sur Bayonetta. Le jeu assume clairement son statut de défouloir sans pour autant déteriorer le gameplay. Ce qui est plutôt rare de nos jours.

Bayonetta représente un modèle de jeu qui n'existe pratiquement plus aujourd'hui: faire un jeu pour jouer. Et le pire c'est qu'il s'en moque. A l'heure où les jeux se rapprochent de plus en plus du cinéma (c'est un fait) pour proposer des expériences où l'on incarne des personnages au caractère travaillé et proposant une immersion de plus en plus forte, aidé d'une mise en scène soigné, Bayonetta agit comme un pied de nez à tout ça. La succession des niveaux n'est pas toujours très logique (passé d'une forêt à un aéroport en deux secondes, la topographie m'échappe) mais on s'en fiche, parce que le jeu l'assume clairement, enchaînant les moments de bravoure très WTF avec des monstres au design très particuliers mais ne ressemblant à rien de connu.

Mais le plus important, c'est que Bayonetta respire la passion. Tous les petites choses en plus, les bonus, le gameplay aux petits oignons et tous les à côtés, les niveaux vraiment WTF, on sent que les développeurs ne lâchent jamais une idée et vont aux bouts des choses et font véritablement ce qui leur plaît. Tout au long du jeu (et surtout la fin, un modèle du WTF), on a l'impression qu'ils ne se sont donnés aucune limite, qu'à aucun moment, ils se sont dits "ça, ça va pas le faire, c'est clairement pas un truc qu'on a l'habitude de voir". C'est toujours exécuté avec brio, c'est bourré de bonnes idées de mises en scènes, de game design, c'est très fluide (en tout cas sur 360) et plutôt bien emballé. Le jeu n'est pas exempts de défauts (les phases de shoot'em up et en moto, un peu too much et surtout trop longues) mais ce n'est rien comparé au reste.

Que ceux qui pensent que Bayonetta c'est juste un moyen de se rincer l'oeil passent leur chemin, les courbures de la demoiselle sont juste un bon point parmi tant d'autres. Bayonetta représente une sous-espèce que l'on croyait depuis longtemps disparu, et que l'on pensait pas voir revenir. Un genre de jeu que la Dreamcast était l'une des dernières a porté en son sein et qui a inévitablement causé sa perte, face à des mastodontes qui ont compris comment la génération de joueurs a évolué. Un genre de jeu où le maître mot est "jeu", fait avec passion et sens du détail.
Un jeu, quoi.
WTF