Ah, le sport électronique, ses coréens mutants et ses affaires de gros sous... Puisque vous traînez sur les pages de ce magnifique blog [1], l'actualité et les évolutions de l'E-Sport n'ont pas de secrets pour vous. Mais au moins, est-ce que vous connaissez ses origines ? Autant vous le dire tout de suite : nul League of Legends, Starcraft ou même CS 1.6 dans cette chronique. Par contre, si vous aimez les pixels baveux, les looks des 80's qui défèquent du charisme et les high scores qui tâchent, vous allez être servis !

Bref, attachez vos ceintures, servez-vous un grand verre de Banga et sortez vos fringues Waikiki des grandes occasions, on remonte en 1981 aujourd'hui. Une année où Atari était encore le grand patron du jeu vidéo et voyait les choses en grand avec sa chère 2600...

 

(Je vous avais dit que cette chronique péterait la classe : je n'ai pas menti !) 

Les championnats du monde Atari (1981 à 83) : premières confrontations, premiers champions...

 

Oui, vous avez bien lu. Neuf années avant Nintendo et plus de vingt avant la création de l'ESWC, la firme de Nolan Bushnell avait déjà imaginé et tenu ce genre de compétitions. Et même si aujourd'hui les informations se font très rares sur le sujet, la raison de l'existence de ce tournoi tient certainement en deux mots : Space Invaders.

 Parce qu'il faut bien comprendre une chose, c'est qu'à l'époque de sa sortie, ce jeu était une véritable révolution, et le terme est ici bien mieux employé que pour qualifier une gamme de téléphones gadgets et hors de prix. Le bébé de chez Taito est le premier jeu au monde à enregistrer un high score, mais son adaptation sur la 2600 VCS en 1980 fera surtout de lui le premier titre de l'histoire à dépasser le million de copies écoulées (il en vendra deux, au total). On se retrouve donc avec d'un côté l'apparition de l'aspect compétitif avec un « record » à constamment dépasser, et de l'autre le premier grand succès commercial sur le marché des cartouches de jeu. Quoi de mieux donc que d'organiser une compétition sur le même titre, ou des inconnus des quatre coins du globe pourront joyeusement se foutre sur la couenne pour la gloire, l'argent et les filles faciles, me direz-vous ? Seules quelques nuances existent entre les compétitions de l'époque et celles d'aujourd'hui. Les cashprizes n'existaient pas encore (les joueurs professionnels non plus, du coup la question ne se posait pas), et la distinction entre les participants se faisaient en sections juniors et seniors, toutes les deux mixtes.

 

 Mais si je vous parle de tout ça, c'est surtout parce que déjà à l'époque, les français étaient parmi les meilleurs joueurs au monde ! Ce sera notamment le cas lors de l'édition 1982, qui s'est déroulée sur Pac-Man et ... à domicile, puisque les phases finales ont eu lieu à Paris. La mission pour les 19 Juniors (moins de 25 ans) et les 12 Seniors en lice est simple : obtenir un des deux meilleurs scores de leur poule lors d'un Score Attack de 15 minutes, puis balancer tout ce qu'ils leur reste de Cosmo dans une finale durant le double de temps. D'ailleurs, pour ceux qui n'ont jamais touché à ce jeu de leur vie, il n'a rien à envier à Starcraft ou Quake niveau réflexes et concentration. Par contre, aucun mutant coréen n'a participé à ce tournoi... Oui, c'est inimaginable de nos jours.

 

(Passer des heures devant un écran comme ça? Il y a trente ans, vous auriez peut-être dit oui...)

 

Au final, pour nos deux représentants, Vincent Noiret en Junior et Gérard Kieffer en Senior, l'aventure connaîtra une fin cruelle. Ils termineront tous les deux seconds de leurs catégories, avec respectivement 19000 et 10000 points au compteur, et quelques regrets après 30 minutes d'épreuve difficiles à gérer. Leur lot de consolation, un voyage en avion avec une distance en kilomètres égale au score effectué, un jeu... et la satisfaction d'avoir surpassé les 150000 autres participants du tournoi. Le tout devant une salle comble de 1500 personnes, soit autant qu'O'Gaming 2. Pas mal, quand même !

Malheureusement, le Krach du jeu vidéo de 1983 et 84, causé par une invasion de jeux mauvais ou inachevés et d'investisseurs peu scrupuleux,  va balayer cette coupe du monde naissante, faute de fonds suffisants ou de sponsors pour continuer à les organiser. Comble de l'ironie, Atari en est un des principaux responsable, en allant jusqu'à sortir des jeux encore à l'état de prototypes, comme le misérable E.T. ou encore... Pac-Man, qui écoulera pourtant 7 millions de cartouches ! L'édition de 83 se tiendra malgré tout sur Centipede, avec une performance honnête de la délégation française (Vincent Goualard terminera 4ème mondial en Senior), et un doublé en or des britanniques lors de la finale à Berlin. Rideau...

 

(Nos deux champions bien de chez nous, dans les colonnes de Tilt.Je trouverais Stephano presque bien coiffé, en comparaison.)

 

Le bonus : Swordquest, tu l'as vu mon gros loot ?

... Mais je ne résiste pas à l'envie de vous parler en vitesse de Swordquest, une série jamais terminée de jeux « compétitifs » sur la 2600, la faute incombant au Krach dont j'ai parlé un peu plus tôt.

 Par compétitif, j'entends que cette série aux accents d'Heroic Fantasy était la base d'un concours géant. Rien d'exceptionnel me direz-vous dans le fait d'organiser un concours sur un jeu, d'autres titres ont suivi cet exemple. Je pense notamment au premier opus de Gran Turismo, qui proposait une Viper GTS (pas virtuelle, celle-là) à son grand vainqueur. Mais Swordquest va plus loin dans le délire, puisque les principaux items que vous deviez obtenir pour faire progresser l'histoire sont aussi ceux que vous pouviez gagner en vrai, via le concours !

 

Si vous voulez en savoir plus, l'AVGN a consacré un de ses épisodes à la série Swordquest, expliquant en détail le principe de cette chasse au trésor (spoil : je le trouve ultra inventif, surtout pour contourner les limites techniques de la 2600 !), le tout en VOSTFR. Et pour vous mâcher le travail, elle est juste en dessous...

 

Ce sera tout pour cette première partie ! La seconde (sur trois, pour le moment) arrivera Dimanche prochain, pour partir au Japon cette fois. Petit indice, on ne parlera ni de Sega, ni de Nintendo...

 

 

[1] : vous serez gentils d'envoyer vos dons sur mon compte bancaire au Honduras. En liquide, pour plus de transparence.

 

PS : Cet article est également (et en quelque sorte, d'abord) disponible sur le site Inesportwetrust. Un chouette blog participatif qui pour le coup accueille cette chronique. Si l'envie vous en dit, n'hésitez pas à jeter un coup d'oeil au reste, vous ne le regretterez pas : https://www.inesportwetrust.com/