Je préfère l'annoncer directement,
le texte qui va suivre ne sera pas particulièrement tendre avec le
dernier rejeton de Remedy. Oui, Alan Wake m'a déçu. Je m'en vais donc
vous expliquer pourquoi.

Déjà, je dois confesser être un fan de
jeux d'ambiance et de survival-horror. D'ailleurs, le côté thriller
psychologique prôné par Remedy pour son dernier projet me mettait l'eau à la bouche. En effet, je suis bien plus emporté par un titre jouant sur
une horreur ordinaire (héros lambda, contexte proche de la vie de tous
les jours) que par une arrivée massive de zombies ou de monstres
quelconques. Et le début de l'aventure est en ce sens. Alan Wake, un
célèbre écrivain, débarque avec sa femme dans la petite ville de Bright
Falls, afin de soigner son syndrome de la page blanche. D'emblée, le
décor est posée. La ville que nous foulons est parfaitement
caractérisée, voire personnifiée. Le travail de ce point de vue est
remarquable : tout semble cohérent, crédible et parfaitement agencé.
C'est à ce moment que le titre ébloui. Les environnements sont
absolument sublimes, contrastant dès lors avec des personnages un cran
en dessous, aux visages figés et inexpressifs. La luminosité globale (au cinéma, on parlerait de photographie) achève de rendre cette ville
superbe, un parfait écrin à l'aventure qui va suivre, pense-t-on. Très
vite, la nuit tombe et la femme d'Alan disparaît. Le cauchemar débute.

Attendu depuis cinq ans, le nouveau
titre exclusif de Microsoft s'était déjà pas mal dévoilé au cours de
différents salons. On s'attendait donc à une ambiance très travaillée et on peut dire que le pari est tenu. La mise en scène et la narration
sont très réussies et les monologues de Wake (qui commente à peu près
tout ce qui se passe) permettent de s'immerger dans l'histoire. Histoire au centre de laquelle on trouve un roman, Departures, que le héros ne
se souvient pas avoir écrit et qui annonce pourtant tous les évènements à venir. Ce qu'on pouvait assimiler à une faute de goût (raconter ce qui
va arriver dans 10 minutes peut nuire à l'effet de surprise) se révèle
en fait très efficace. Lorsque l'on tombe sur une page annonçant
l'arrivée imminente d'un ennemi armé d'une tronçonneuse, je peux vous
dire que l'effet est immédiat et qu'on progresse en redoutant d'entendre le moindre son mécanique. Non vraiment, sur le plan de l'ambiance, le
travail effectué est remarquable, d'autant que les jeux d'ombre et de
lumière, au centre du game system, sont assez incroyables et rajoutent à l'angoisse. D'ailleurs, le premier épisode (le jeu est découpé en 6
chapitres, pour une périple total avoisinant les 10 heures) a su me
faire frémir. Je suis en général assez client des jeux de flippe et j'ai tendance à me laisser entrainer sans mal dans les combines des
développeurs visant à m'effrayer. Dès que les possédés (des êtres
humains plongés dans les ténèbres et qui apparaissent sans crier gare)
ont débarqué, un sentiment d'oppression s'est mis en branle. Le temps de maitriser le gameplay...

Ce gameplay est très simple. Équipé
d'une lampe torche, il suffit d'éclairer les ennemis un certain temps
afin que le bouclier de ténèbres qui les protège se dissipe. Il faudra
alors les aligner avec votre arme pour les voir succomber. Il existe
bien un système de piles, chargé de ressourcer votre torche une fois
celle-ci à bout (et sans devoir attendre qu'elle se recharge toute
seule, ce qui peut prendre quelques secondes) et qui pourra vous mettre
en panique dans le feu de l'action, mais rien n'y fait. Ces phases de
combat sont désespérément répétitives, mécaniques et limitées. Les
ennemis sont, grosso modo, toujours les mêmes, au mieux en trouve-t-on
certains plus résistants, et les phases où ce sont les objets qui vous
assaillent (tuyau, bidon, moissonneuse-batteuse) sont loin d'exciter le
palpitant. C'est d'ailleurs le gros problème du jeu : on s'y ennuie
fermement. Dès qu'on maitrise le système de combat et qu'on assimile les mécanismes de survie, tout cela tourne sacrément en rond. Résultat, on
se ballade pendant des heures dans la forêt, on tue des grappes
d'ennemis et on continue. La progression est redondante, autant de par
ce qui demandé au joueur qu'au travers des environnements traversés. Les situations inédites, venant briser la routine, sont bien rares et
brèves, et si le tout s'emballe un poil passé le chapitre 3 (soit à la
moitié du jeu), les premiers instants sont incroyablement poussifs et
laborieux. C'est bien simple, au bout d'une heure de jeu, on a vu
l'intégralité de ce qu'avait à offrir le titre. D'autant que l'histoire, le moteur qui vous donnera envie de poursuivre, se révèle en fait très
classique, pas forcément passionnante et avare en rebondissements. Seuls les moments où l'ennemi est en large surnombre sauront exhumer la
légère tension ressentie au début du jeu. Mais de nombreux détails m'ont fait constamment sortir du trip. On peut citer les animations du héros, rigides et maladroites dès qu'il rentre en contact avec le moindre
objet de l'environnement (porte, obstacle, etc.), le prétexte narratif
qui vous envoi parcourir des kilomètres à pied (ou en voiture, sans pour autant que ce soit plus intéressant), espaçant de trop les séquences
narratives (un peu plus passionnantes) ou encore l'impression de joueur à un jeu qui a vraiment un train de retard, le genre action-shooter ayant considérablement muté ces dernières années (quels jeux de ce type
propose encore un bouton de saut ?).

Même si Alan Wake n'est pas
foncièrement un mauvais jeu, il n'en reste pas moins une grosse
déception. Son côté daté et son gameplay simpliste n'incite pas vraiment à avancer. Pas plus que le scénario, assez moyen au final. Seules
restent l'ambiance, très au point, la bande son de qualité et la ville
de Bright Falls, un décor sublime qui méritait d'abriter un jeu d'un
autre calibre. Il est pourtant certain que de nombreux joueurs y
trouveront leur compte (en témoigne les tests français, assez
dithyrambiques), mais il ne serait pas étonnant qu'Alan Wake se reprenne de plein fouet toute la hype qu'il avait accumulé. Franchement,
préférez lui le dernier Silent Hill sorti sur Wii, si vous ne l'avez pas encore acheté.

CouCou

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