La Nintendo 3DS est dans les bacs depuis une petite semaine, sortir la boule de cristal pour quelques divinations sur l'avenir de la nomade serait un tantinet risqué. Néanmoins, comme on est des gros fous chez Console Syndrome, nous allons essayer de souffler sur le brouillard épais qui recouvre le dessein de la nouvelle DS. La réflexion du jour portera donc sur les lendemains du tactile de la 3DS. Étonnant, non ? Pourquoi se pencher sur cet aspect désuet alors que la troisième dimension s'affirme et obnubile toute l'industrie. Et bien justement, pendant que la 3D est sous le feu des projecteurs, le tactile est peut-être en train de jouer sa vie !

Et si le destin du tactile se jouait maintenant ? Au carrefour d'un terrible embranchement, la fonction tactile va peut-être gagner ou perdre totalement de son intérêt. Commençons avec la vision la plus optimiste. Depuis l'avènement de la 3D, plus personne de se souci de l'écran inférieur de la console, alors que c'était lui le clou du spectacle fin 2004, lors de la sortie de la DS au Japon. A l'époque, tous les efforts des studios de création étaient concentrés pour exploiter aux mieux cet attribut. Maintenant que la 3DS est dans la place, c'est la 3D qui occupe principalement l'esprit des développeurs. A tel point que ça n'étonne personne de constater que le jeu du lancement estampillé Nintendo ne soit en rien tactile. Un état de fait passé totalement à la trappe car Pilotwings exploite sublimement la 3D : l'effet est saisissant, la troisième dimension saute aux yeux et monopolise complètement l'attention. Une mise à l'écart qui pourrait très bien être bénéfique au tactile. A partir de maintenant, les fonctions de l'écran inférieur ne deviennent plus la contrainte à utiliser absolument pour entrer dans le cahier des charges, mais un outil comme un autre à la disposition des créatifs. Le tactile peut à présent s'épanouir sereinement, être employé de façon plus réfléchi, avec parcimonie et seulement quand un titre le nécessite. Le tactile serait donc appliqué pour soutenir une vraie idée de gameplay et non plus comme une astreinte, comme à l'époque de la DS. Un phénomène similaire s'est déjà produit avec les boutons de tranche de la manette Super Nintendo - apparu pour la première fois avec cette machine - qui sont aujourd'hui considérés comme un dispositif classique, mais qui fût en 1990 approchée comme une révolution.

On quitte maintenant le monde enchanté pour envisager le pire des cas : la perte totale de l'intérêt du tactile. Les quelques semaines d'activités de la 3DS suffisent à établir un premier constat peu reluisant : le tactile est très discret et quand il daigne se montrer, il perd malheureusement de son ampleur. Comme l'a très justement pointé du doigt Erwan Cario dans un Silence on joue !, quand le tactile s'invite sur 3DS, il créé une distanciation avec le joueur. Pour mieux comprendre cette réflexion, le journaliste prend l'exemple concret de Nintendogs. Dans la version DS, caresser son chiot se faisait sur l'écran du bas, celui où le chien apparait. Un lien ténu, visible, tactile, existait entre l'animal et le joueur. Sur 3DS, gratter le cabot demande toujours une friction de l'écran du bas avec le stylet, mais c'est sur l'ombre de l'animal qu'il faudra s'exécuter. Logiquement, les développeurs ont choisi de mettre en valeur la technologie 3D et ont donc fait de l'écran supérieur le moniteur principal, c'est donc sur ce dernier que le chien vient vous léchouiller en 3D. Valoriser un écran (et donc une technologie) au détriment de l'autre est une décision qui va à présent se poser de façon systématique. Que vont se dire les studios : faire un jeu sur l'écran 3D avec un effet attractif et à la mode ou proposer le même titre sur l'écran du bas, mais avec peut-être un gameplay moins précis ? ». Ghost Recon Shadow Wars présente bien le possible résultat de cette problématique. Tactical de son état, l'évolution des batailles se fait donc à travers un damier. Y a-t-il un meilleur moyen de s'adonner à ce type de jeu que de dessiner le trajet précis de son personnage avec le stylet sur l'écran du bas ? On est d'accord, la réponse est non. Par le passé, on rêvait même d'avoir cette alternative. Même si techniquement c'est possible, avec la 3DS, ce n'est pas le cas, on joue avec le stick analogique ou la croix de direction. Valoriser le tactile sur 3DS pourrait donc être perçu comme rétrograde par le public face à la mise en avant de la 3D ? Possible. Les développeurs auraient pu choisir le compromis en faisant switcher l'écran du haut avec celui du bas par la simple action d'une touche, mais je me pose la question du mal de crane. Est-ce que décrocher de la 3D sans cesse est préjudiciable, sincèrement, je n'en sais rien. Quelle conclusion tirer de cette analyse ? Aucune (merci quand même de nous avoir lu), tout bonnement car le line-up de lancement d'une machine n'est en rien représentatif de l'avenir d'une console. Néanmoins, ce bilan représente un cliché pas anodin sur l'éventualité d'un gain ou d'une perte d'intérêt pour le tactile.

Nintendo à choisi de ne pas faire évoluer le tactile de sa machine, le multitouch ne s'est donc pas invité à la fête (contrairement à la future NGP de Sony). Dommage, cela aurait pu inciter les studios de développements à ne pas snober la fonction tactile comme ils le font aujourd'hui. Mais c'est aussi peut-être une chance, car dans le jeu vidéo, se fondre dans le paysage, c'est être utilisé avec égard et discernement.

Par Med