Nota : un brin d'optimisme et d'idéal pour cet article un peu particulier, auquel je ne prête que l'ambition d'un jeu vidéo fédérateur, ouvert à tous.

Je me suis toujours montré particulièrement optimiste avec le jeu vidéo. Au delà des coups de gueule, des déceptions, des réjouissances à court terme, j'ai toujours pensé que le meilleur était à venir. Que tout bluffé que j'étais par certaines productions à la fin de la PS2, il en serait de même sur cette génération de console. Et ça n'a pas manqué. Bien sûr, on peut parfois se sentir dépassé par cette virevoltante inclusion du jeu vidéo dans le tout public, mais je considère vraiment que c'est pour le meilleur. Et qu'explorer ses méandres ne devrait servir qu'à mieux s'en délecter, plutôt qu'à y regretter quelque chose. A quoi bon écrire dessus, sinon ?

Jacques a dit : tout le monde il joue

Warren Spector, à la tête du projet Disney Epic Mickey destiné à sortir au mois de novembre, s'exprimait récemment en ces termes :

« Je pense qu'actuellement on est dans une sorte d'âge d'or. » « Je peux faire une exclusivité Wii avec le personnage de Mickey Mouse. Quelqu'un d'autre peut faire un MMO entièrement original et coutant 100 millions de dollars. J'ai des amis qui travaillent littéralement tout seul sur des jeux indé à but non lucratif. J'ai des personnes qui travaillent sur des jeux iPhone. » « Il y a quelque chose pour tout le monde, ce qui signifie qu'il y a, pour tous les développeurs, quelque chose à faire, quelque chose qui fera jaillir leur passion ». « Le jeu vidéo est dans une période assez spéciale actuellement, et nous devrions en profiter, nous réjouir des réalisations que nous aimons, en laissant les autres personnes faire de même avec ce qu'ils apprécient. »

Et il avait raison. Aujourd'hui, la prouesse des jeux vidéo, ce n'est pas d'être toujours plus réalistes ou plus accessibles, c'est d'avoir apporté la variété qui manquait à son succès. C'est d'avoir su convaincre toute sorte de public. C'est d'avoir montré aux créatifs que tout était faisable, tout était permis, et ils nous le prouvent régulièrement. Nulle question de s'extasier gratuitement, ni de regretter une certaine forme d'industrialisation de masse, mais de reconnaître que de plus en plus, chacun peut s'y retrouver, pour la plus grande satisfaction de tous.

 

Plus que jamais, donc, le jeu a aujourd'hui de multiples visages. On peut jouer sur PC, sur le web (et le web social), sur Wii, sur Xbox 360 ou PS3 ; on peut rentabiliser ses transports en commun, sortir sa console portable. Au delà des supports, les interfaces elles-mêmes ont évoluées, laissant parfois l'alternative. Ni mieux ni moins bien, ou juste mieux, les jeux ont progressivement abandonné le standard narratif de l'époque : la progression par l'échec, qui demeure toutefois prédominante. De nouveaux types de game design ont émergé, des nouvelles intentions. La technologie, au service de la narration, a permis des avancées fantastiques au gré des générations, comme le déclarait Shigeru Miyamoto au sujet de la saga Mario.

Pourtant, il semble que plus le choix est vaste, plus les intentions sont fortes. Et parce qu'il faut bien choisir...

Le monopole du bon goût

En matière d'anecdote, j'avais eu quelques mots à l'adresse d'un blog qui, lors de l'évènementiel Final Fantaxy XIII à la Fnac de Paris, n'avait non pas pondéré les critiques anti-Wii d'un public pourtant montré comme étant au minimum versatile, mais les avaient appuyées dans les commentaires en ces termes : « La Wii pourrit (...) le monde vidéoludique ». Les bras m'en étaient tombés. Avoir des désaccords est chose commune, mais donner une telle teneur dramatique, une telle emphase destructrice à la Wii dépasse mon entendement. C'est à cette occasion que l'idée de bon goût, forcément ironique, m'apparut. Depuis, l'idée a fait son chemin, et je n'en tiens pas grief au site pour autant.

On pourrait revenir à loisir sur la Wii, lui rendre l'ambition qu'elle mérite et reconnaître que Nintendo a eu du bagout - en a toujours - , regretter qu'elle n'ait pas ce petit plus en terme de puissance brute, ou qu'elle demeure à un tarif un brin exagéré. Mais ça serait s'étaler inutilement pour mieux jouer les appeaux à troll. Reconnaissons toutefois que la Wii répond à une demande, et qu'elle a su divertir un public moins enclin à s'informer sur les jeux vidéo, tout autant que certains gamers curieux, passés et à venir.

Ce genre de critique est pourtant loin d'être isolé, et devoir considérer d'autres manières de jouer que la sienne semble n'avoir jamais été aussi difficile. Avant il y avait Sega, il y avait Nintendo. Il y avait Nintendo, il y avait Sony. Et aujourd'hui, qu'y a-t-il ? Sony, Nintendo, Microsoft, Apple, les téléphones portables, les réseaux sociaux ? Pour des dizaines et des dizaines de façon de jouer ?

 

Ça serait être un peu réducteur que de limiter ça une simple une guerre de machine, la vérité c'est qu'il est bien plus simple de considérer les choses de son point de vue. Quoi de plus normal qu'un joueur PC qui considère que les FPS n'ont aucune raison d'exister sur console ; qu'un joueur régulier qui considère qu'être « casual », c'est être ignorant. Mon scepticisme à l'égard des « clans » s'est établi au fil des années : PC-iste, Consol-eux et consorts. S'asseoir sur un trône pour mieux pointer du doigt, faire rentrer les gens dans des petites cases. En y regardant de plus près, c'est quand même assez ironique que des gens qui se revendiquent tous « geek » en fassent éminemment l'usage. On est tous copains, tous geeks, mais on y trouve « des sales consoleux » ? Les jugements de valeur ont encore de beaux jours devant eux.

Plus encore qu'avec les autres, se définir et se donner une appartenance à un groupe c'est aussi être réducteur avec soi-même ; c'est se priver de quelque chose. Pourquoi s'inscrire dans une minorité et faire le désaveu du reste ? Le jeu vidéo est sans doute le divertissement le plus mal défini qu'on puisse trouver. Une catégorie de jeu donnée peut se retrouver sur tous les supports de manière plus ou moins similaire. Impossible, impensable qu'il puisse y avoir quelque chose de bien « en face » ?

C'est pourtant un simple constat d'ouverture. Je déteste me faire moralisateur, mais avouons-nous, au moins ici, que les joueurs réguliers ou les anciens joueurs ont peut-être des choses à transmettre. Et que les personnes qui découvrent les jeux vidéo ont parfois besoin de conseil. Il est somme toute assez dommageable que quelqu'un qui ignore tout du domaine se précipite en boutique pour se laisser influencer par un sourire ravageur ; il l'est tout autant de jouer dans son coin en regardant les autres de haut. C'est de la difficile tâcher de rationaliser sa passion dont il s'agit. D'échapper au tourbillon des émotions pour mieux communiquer et transmettre ; pour donner un sens à l'envie fugace de dire, d'écrire que le jeu vidéo vaut bien mieux qu'une guerre de tranchée.

Par Memento

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