Rarement une saga aura fait parler d’elle pour sa cruauté, ses game over à outrance et ses morts plus cons les uns que les autres.

 Si cette série peut paraitre difficile aux premiers abords, ne pas s’y fier; pour peu que le joueur fasse preuve d’un tant soit peu de méthodologie, de ténacité et le titre se montre plus abordable aux communs des mortels. Enfin tout est relatif, bien sur, mais certains titre de la même trempe pouvaient se targuer d’être bien plus ardus, il n’y a de ça même pas une dizaine d’années…

 Ce qui fait de la série des Souls un cas complètement anachronique et singulier, c’est sa politique à l’encontre des dogmes ludique actuels imposé aux joueurs, par l’intermédiaired’une philosophie aussi vieille que le jeu vidéo lui-même: le « die and retry ».

 Après avoir créer son personnage parmi les différentes classes proposées (chevalier, magicien,etc…), pas de tutorial, les présentations se font d’une manière assez « brutale » : on n’en dira pas plus. Sous ses airs austères, et avec une approche qu’on adoptera ou non en fonction des différentes situations, la saga dévoile ce qui faisait le sel des titres des années 80-90: du fait de crever facilement dans les jeux de cette période, la meilleure façon de les finir consistait à connaitre les niveaux pratiquement par cœur.

 Ce qui est un peu le cas des Souls, avec cependant un ajout de taille : l’entraide entre les joueurs connectés, par le biais de message qui préviennent de traquenard et autres pièges; l’internet ne se fait alors plus gadget, mais partie intégrante du gameplay.

Mais ce que le online  peut offrir, il  vous le reprend de suite: les joueurs avec de sales intentions peuvent tout aussi bien venir squatter votre partie avec pour unique objectif, vous tuer: c’est l’effet « kiss cool » de la chose…

 Vient alors la question du contenu : commençons donc par le commencement :Demon’s Souls.

 C’est le seul de la série qui adoptera le système de « hub », le joueur est plus ou moins libre de gérer son périple de la façon qu’il le souhaite, par l’intermédiaire d’une salle centrale proposant différents niveaux.

Demon’s Souls est également, et logiquement, l’épisode/initiateur d’une architecture particulière; chaque monde à une identité propre: la forteresse, dont les couloirs et escaliers sont autant de terrains propices a la félonie, les marécages empoisonnées, la montagne et ses allées côtoyant le vide, les geôles sombres et étroits, etc…tout cet univers contribuera au succès de la franchise, en plus des personnages plus ou moins « amicaux » que vous croiserez sur votre route, des marchands pour certains et des âmes errantes pour d'autres .

A noter également que des feux de camp, sorte de « checkpoint », sont disposés ça et là dans les niveaux de façon à sauvegarder et se restaurer par la même occasion. Une idée qui sera reprise par la suite.

 Les ennemis ne sont pas en reste et participe grandement à la réputation de la saga. Bien que leurs attaques et parades soient scriptés, s’en débarrassé pourra relever de la gageure, encore pire s’ils sont en nombres .Leur design est cohérent en fonction du monde visité, et jouent même avec la topographie des lieux.

Tout cela débouche inévitablement sur les boss, peu nombreux mais marquant, avec un travail et un soin particulier sur leur chara design. Impressionnant au départ, le « bourrinage » est peu recommandé et une préparation est généralement requise avant confrontation contre ces  derniers. Heureusement une petite cinématique prend toujours la peine de prévenir le joueur de la présence d’un affreux. Toujours ça de pris.

 Enfin un mot sur l’atmosphère: autre cachet de la série, elle se démarque du tout venant, avec une  mélancolie et une noirceur quasi inédite dans le domaine du RPG japonais. Cela s’explique en partie par des références culturelles très occidentales, que ce soit littéraire ou picturale; il faut savoir, par exemple, que l’ombre de Faust plane énormément sur la saga de From Software, entre autres.

 

 

From Software justement, qui, ces bases posées, récidivera  avec la série des « Dark Souls ».

Au nombre de deux, ainsi que des extensions, cette saga va se démarquer de son ainée principalement par sa progression, plus « en ligne droite » ; une autre philosophie en somme, mais les bases de Demons Souls sont là. Les feux de camp font leur grand retour, les royaumes de Lordran et Drangleic, respectivement monde de Dark Souls 1 & 2 sont justes bien plus vastes, et le nombre de boss est décuplés.

Le premier épisode  imposera de nouveau standards dans cette gamme de titres où il faut foncièrement s’investir, mais le jeu en vaut la chandelle: à l’image de Demon’s Souls, une fois une méthode d’approche assimilée, c’est un vrai plaisir de tenir tête au challenge présenté devant soi. Car une fois encore, le fait de mourir lamentablement n’est en aucun cas considéré comme une punition. La fameuse expression « Ce qui ne tue pas rend plus fort »  de Nietzsche résumerait parfaitement l’état d’esprit du titre; comme happer par une force acquise avec l’expérience, le joueur continue, avance dans les pires conditions possibles, ne voulant sous aucun prétexte arrêter son périple afin d’aller  toujours plus loin.

La grande qualité de Dark Souls est finalement son plus grand défaut : il vous possède jusqu'à l’obsession. L’enchainement entre les mondes se fait d’une manière tellement naturelle et fluide, c’est un vrai trip, certes pas facile mais toujours bon avec le méritant. La joie d’occire un boss n’aura jamais été aussi prégnante, tout comme l’excitation de customiser son personnage avec une nouvelle arme: c’est dans ces moments là que le terme « marge de progression » prend vraiment tout son sens.

Ajouter à cela le online toujours opérationnel pour vous pourrir la vie (ou pas), des boss toujours aussi mirifiques, des moments touchés par la grâce, des donjons prises de têtes en veux-tu en voilà et autres quêtes annexes à foison…il est intéressant de noter sur ce point, l’apparition des serments, sorte de "pacte" fait avec un PNJ, lequel vous demandera certaines choses en échanges, bien sur, d’items ou âmes en cas de réussites. On se félicite, on s’insulte pas mal aussi, bref Dark Souls se vit.

 

Dark souls 2, par la similitude de certaines bases, pourrait logiquement être considéré comme une extension du premier. Cependant la téléportation via les feux de camp, accessibles dés le départ et la possibilité de s’équiper avec plus d’anneaux, entre autres, donnerait l’impression que cet épisode joue la carte de l’accessibilité. Ca serait omettre la diminution des fioles d’Estus pour la santé, un monde avec plus d’embranchements et certains boss bien balèzes.

Certes moins marquant que son ainé, l’effet de surprise n’étant plus, cette suite n’en demeure pas moins agréable sous bien des aspects. Si on lui a souvent reprocher une certaine incohérence globale liée a l’architecture du monde de Drangleic , elle n’est pas flagrante, la carte de la « fantasy » autorisant énormément de liberté sur le plan créatif. Très généreux, que ce soit sur les quêtes annexes que le « looting » en général, cet épisode souffre finalement d’un aspect copié/collé par rapport à son ainé: ainsi, il n’est pas rare d’avoir cette impression de déjà-vu sur certains mondes ou boss ; ces derniers sont d’ailleurs purement et simplement des « skins », tiré du premier épisode.

 

Terminons sur un point important : l’effet sonore. Pour faire simple, les différents thèmes musicaux savent se faire discrets tout en mettant l’accent sur les moments clés, et ce sur les trois épisodes susmentionnés; empruntant à des références diverses, elles sont toujours en accord avec les lieux traversés et surtout, ne jouent pas la carte de l omniprésence, ce qui leur donne  encore plus d’importance. Leur dosage est équilibré de façon à donner un semblant de solitude au joueur, et donc une forte  immersion. Tantôt grave, tantôt baigné d’espoir, la musique par sa place accordé dans la série des Souls, pourrait être un personnage à part entière.

 

Pour finir

Tout a été dit sur cette saga, jeu somme et parfait cocktail du jeu à l’ancienne et contemporain. Si Dark Souls premier du nom pourrait être le parfait représentant de la série, du fait de sa finition et de sa réputation, finalement cela n’a aucune importance. Car tout « gamer »   autoproclamé qui se respecte, se doit de passer par la case des Souls, et ce, quelque soit l’épisode. Pas aimable pour un rond, voire franchement détestable par  moment, la saga  d’Hidetaka Miyazaki fera surement école chez les futurs créateurs de jeu dans les années à venir, du moins faut-il l’espérer: il y va de l’avenir vidéo-ludique.

 

9    (Pour la série en général)