Déjà paru dans la collection Shampooing, Le jeu vidéo constituait un recueil de scripts sur un des péchés coupables de l'auteur de Polina, celui ayant trait à l'art du bas-avant gros poing et du 'frag' obsessionnel. Toujours dans cette même collection chapeautée par Lewis Trondheim vient de paraître La famille. Vivès y reprend le même format humoristique tout en rendant le contenu plus accessible à un large public. Quoique, il faut le dire vite, car si avec cette bande-dessinée le lecteur n'aura pas à décrypter ce qu'est un 'shoryu cancel' ou à saisir la pleine essence du 'mind game', les strips proposés ici ne seront pas à conseiller au premier lecteur des Légendaires venu.

     Car là où la typographie du titre se veut traditionnaliste (image d'Epinal, es-tu là ?), l'humour que l'on retrouve dans le cœur de l'ouvrage lorgne davantage vers le subversif et le  décalé. Dès le début, Vivès pose le décor. Tranquillement installés à une table, un père et son fils s'embarquent dans une discussion des plus surréalistes. Alors que le bambin demande au pater familias ce qu'est une turlutte, on s'attend à une suite formelle dans laquelle le parent responsable s'offusque qu'on lui pose une telle question (une simple version décalée de la publicité Lactel, en somme). Il n'en est rien. Stoïque, le père répond avec calme et crudité à sa progéniture et ne manquera pas d'approfondir le sujet sans pudeur tout en proposant une clope à son fils. Les strips de cet acabit justifient le caractère « Pour lecteur averti » de ce livre. Cependant, l'humour de Vivès fait mouche, une fois de plus. Son pari est moins de proposer un album visant à éveiller la nostalgie (comme cela pouvait être le cas dans Le jeu vidéo) que d'aborder une alternative de la famille telle qu'elle pourrait être, notamment à l'avenir. De ce fait, la rencontre des parents ne ressemble en rien à une aventure romantique ou épique, mais à un feuilleton qui se résume à des liens Facebook. Hilarant et très bien vu.


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