Chapitre I.

L'Appendice ci-dessous est écrit par Celimbrimbor.

APPENDICE I : Brimbor le Scribe

Ah, il avait la gueule belle, le héros des temps anciens. Le vieux se regardait la face dans la marre un peu sale où il avait fait ses ablutions, lavé son linge et bu - pas nécessairement dans cet ordre-là - avec un regard désabusé, un peu tempéré par le fait que, d'abord,il n'avait jamais été un héros et que, ensuite, il n'avait jamais eu de belle gueule. Au final, ce n'était rien de plus qu'un vieux bancal avec une migraine, qui n'avait plus de sous parce qu'il avait tout bu - d'où la migraine, suivez un peu - et un mal aux lombaires à faire pâlir un chêne. Il se redressa après avoir vérifié qu'il ne lui restait plus de traces de vomi sur le visage, fit craquer ses jointures. Une demi heure après -plus on est vieux, plus on a de jointures. C'est fou ce qu'on se découvre comme jointure avec l'âge. Et comme souplesse, oulà, ah oui. On devient souple comme un planche de cercueil. L'évolution, sans doute. S'adapterà son environnement direct. - il se mettait en quête de son but du jour : un repas.

Parce que, ouais, faut bien l'avouer, boire, ça donne faim. Et manger liquide, même si cela a du bon, ben cela ne suffit pas à remplir son homme. Surtout quand l'homme à la gorge directement remplie à la vessie et qu'il ne fait que louer la bière - si quelqu'un trouve d'où elle sort celle-ci, il gagne - sans jamais vraiment l'acheter. Et c'est pas faute de la payer, pourtant.

Alors donc, le vieux con se mit en route, prêt à sillonner le pays de Ehblog. Enfin, pas au sens littéral. Il n'avait pas de charrue et à peine la force de lever le bâton qui l'aidait à marcher. Alors, pousser une charrue était à ses priorités ce que la défense de la boîte en X était au nécromancien Seth de Suna, xième du nom.

En fait, ce qui provoquait l'errance de ce pauvre Brimbor n'était rien d'autre que son emploi. Aussi surprenant que cela puisse paraître aux habitants de la Commune Ehblog, qui ont tôt fait de convertir leur salaire en nouveaux geux - les geux sont une espèce de geais très particulière, qui ont reçu un don unique de la part de la nature: raconter des histoires que l'auditeur peu modifier en tapant plus ou moins fort sur la tête du geux. Il suffit pour cela de l'enfermer dans une cage, une boîte en x ou une cubique, par exemple, et de l'asticoter par les ouvertures prévues à cet effet, des croix, des croix, des carrés, des ronds, des ronds ou des triangles - et suivent en cela l'exemple d'un couple ayant sombré du côté obscur, les tristement célèbres John et Ouane, le vieux Brimbor ne pouvait passe payer se luxe.

Le problème ne venait pas du salaire. Le problème venait de la façon de l'obtenir. Celim était bibliothécaire - on le prenait pour un scribe parce qu'il refourguait en douce les écrits qu'il dérobait à la dérobée [magnifique] dans la bibliothèque - et devait gérer une collection de livres que nous tairont. Mais il paraît qu'elle faisait concurrence, dans la catégorie des trucs longs et chiants, à la collection de geux que le divin monsieur P** devait gérer pour le bien être de la commune Ehblog. Autant vous dire que c'était du boulot.
Or, il est un fait connu, on s'adapte à son environnement. Les tenants d'un darwinisme bon chic bon genre vous diront qu'il s'agit d'une merveille de la nature. Les gens un peu scrupuleux, comme le fou du village qui n'allait que sous son pseudonyme de « Hein ? Faut voir point comme ! » prétendrait qu'il s'agit en fait d'un complot,sans doute initiés par des suifs - moi non plus, je ne l'ai jamais compris - avec pour but d'illuminer les gens - quel autre destin pour une boule de suif [magique] - et tutti quanti. Mais ayant suivi les leçons précieuses du grand Gay Mort aux nains pas ronds - il n'était pas mort ni chevalier de la manchette, simplement il trouvait son prénom Gayvin un peu ignominieux et son nom de Mortadelle un poil infamant - je peux vous énoncer une vérité tout autre. C'est en fait l'environnement qui vous force à s'adapter à lui.

Eh oui. Car les environnements songent, un peu comme les cristaux, en fait. Vous savez ? Ceux vers où l'on récolte beaucoup de chocs aux bosses. Et donc, les environnements pensent et cherchent toujours à avoir des serviteurs de plus en plus performants. C'est pourquoi un miroir ira toujours avec un rasoir au fil bien effilé. Ou qu'un fusil se tiendra proche d'une tronçonneuse. En cas d'invasion de sauterelles géantes, pour mieux organiser la résistance.
Tout irait pour le mieux dans le meilleur des mondes l'âne Kong pourrait rentrer dans sa campagne manger des bananes si le champ morphique de la réalité ne luttait pas violemment contre le champ morphique des gens. Et il ne s'agit pas de racontars de raseur. Combien ont vu le pauvre Mario - un peu comme Alice, en fait, qui revenait de sa folie- se voir pousser une queue étrange après avoir glissé sur une feuille.

Et la réalité tapait sur le vieux Brimbor pour qu'il s'adapte à son environnement. Or, tout le monde sait bien que la forme la plus correcte pour un bibliothécaire est celle de l'orang-outan. C'est-à-dire un roux - qui n'a pas d'âme, comme le souligne parfois le guerrier des cristaux (non, pas Zack, l'autre) - avec un sourire ahurissant et des membres qui tiennent plus du sac de patates bizarrement rempli que de... membres, justement. C'est-à-dire quelque chose auquel Celim ne voulait pas du tout ressembler, parce qu'il n'avait déjà pas beaucoup de chance avec les femmes - la dernière, qui venait du futur, l'avait planté aux chiottes - et qu'il ne voulait pas empirer son cas.

C'est pour cela que Brimbor passait le plus clair de son temps partout sauf à la bibliothèque qu'il devait gérer, confiant dans le principe d'auto-génération du chaos. Au bout d'un moment, à force d'être en bordel, tout serait dans l'ordre.

Il se trouve cependant qu'en ne bossant pas - ou peu et surtout en chapardant - on ne le payait pas. Aussi avait-il monté un endroit où il pourrait déclamer les choses qu'il volait à la bibliothèque. L'idée fit long feu. À part un certain Sire Tank et une tasse de chocolat, peu de monde lui disait qu'il l'aimait, ce qui le chagrinait beaucoup. Après tout, quand on n'a plus rien pour ses vieux jours et même plus l'amour des autres, que faire ? Mais ce n'était que justice - rangez les violons - car lui-même n'aimait personne ni rien.
Alors il buvait, pour oublier. La taverne où il se rendait pour cela avait pour nom « Le Chat ». En fait, plutôt, on l'appelait « Le Chat ». Parce que son enseigne était ouverte au tout venant, ce qui faisait que chacun, dès qu'il avait un petit coup dans le nez - ou un gros, quand c'était Juju « le messie 2 le retour » Babadabidouba qui l'assénait. Le bouboui changeait ainsi de nom comme de chemise.

Là-bas, une clientèle nombreuse se mêlait et s'oubliait. À bien y réfléchir, c'est surtout le mouton du coin qui s'oubliait souvent, parce qu'il n'avait aucune manière. Les autres gens, dans l'ensemble, étaient plutôt sympathiques et fort peu bégueules. Par exemple, quand l'un montrait ses fesses en disant « Qu'il est haut ! », personne ne lui jetait la pierre. Et ainsi Celim trouvait des gens pour discuter et boire. Surtout pour boire, vu que Benne et Ouate ne laissait jamais un verre vide très longtemps.

Bon, voilà pour la petite histoire. Qui, avouons-le, ne vous renseigne pas sur l'origine de cette fichue carte. Mettons que je n'en sais rien moi-même. Tout ce que je sais, c'est qu'il l'échangea contre un bocal de soupe au poireau qu'on lui avait fait passer pour un pot-au-feu. Et qu'il jura de se venger. Mais ça, ben, c'est une autre histoire.