Bonjour Dany. Tu as un parcours qu'on peut qualifier de long aujourd'hui pour
le monde du jeu vidéo. Pourrais tu résumer un peu ton cursus depuis
l'époque Tilt ?

Dany Boolauck : Après avoir terminé avec succes mes études a l'ESCE (une grande école
commerciale) je suis a fond dans le badmintion (j'étais classé 1ere
série a l'époque) et les jeux videos...Ce sont mes potes mordus d'Amiga
et Atari ST qui me poussent à poser une candidature spontanée a Tilt...
et ça marche!
L'époque Tilt et l'époque Joystick pour être plus
précis...il ne faut pas oublier que je quitte Tilt pour rejoindre la
rédaction de Joystick en tant que rédacteur en chef adjoint mais ca ne
dure pas longtemps et je retourne a Tilt en tant que rédac chef adjoint
là aussi. Après ça j'entre chez Delphine Software/Adeline Software comme directeur du dévelopement et je travaille avec les deux équipes
dirigées respectivement par Paul Cuisset et Frederick Raynal. Je quitte
Delphine et la France pour vivre en Thailande (pour des raisons
personnelles) et je pense a ce moment que ma carriere dans
l'industrie du jeu est termine. Erreur ! Je suis contacté par Virgin
Interactive qui me propose le poste de vice président de Virgin
Interactive sud est asiatique. Tout se passe bien jusqu'en 1997: EA
achete toute la partie dévelopement... c'est le glas pour Virgin
Interactive. Je décide donc de créer ma propre société de distribution
en Thailande qui est aujourd'hui le distributeur exclusive de Namco
Bandai et de Square Enix Europe.

Tu es passé de l'autre côté de la barrière en somme. Pourrais tu nous raconter un peu les débuts de Tilt ? Comment est ce qu'on arrive à participer à quelque chose de
totalement nouveau pour un domaine émergeant alors qu'on est formé au
commerce et à la vente ?

Dany Boolauck : Un peu par hasard, je venais de
terminer mes études et je consacrait la plupart de mon temps au
badminton (mon autre passion) et je faisais parti d'une bande de geeks
de la micro et on voulait essayer tout les jeux qui sortaient que ce
soit sur Apple II, Atari ST ou Amiga (j'avais les 3). Mes copains me
poussent a contacter Tilt (l'idée était d'avoir toutes les nouveautes
gratis!) qui justement recherche des testeurs. Je rencontre Jean Michel
Blottiere qui m'embauche tout de suite comme pigiste pour la soluce d'un jeu de rôle (Faery Tale sur Amiga je crois).

L'équipe Tilt est super sympa et m'encourage (je n'avais jamais écrit d'article auparavant) et je me passionne pour tout ce qui touche a Tilt. Je passe mon temps la-bas, toujours prêt a jouer,
tester, écrire mais on ne me donne que des miettes ! Il y avait déjà la une
bonne équipe de pigistes et de rédacteurs et se faire une place au
soleil c'était pas évident. C'est le hors-série Amiga Atari ST qui me
permet de faire mes preuves: Tilt Hors-série avait besoin de testeurs
Amiga et ST. Ils font appel a moi pour recruter un groupe de testeurs.
J'enrôle mes potes mais ils lâchent très vite sous le poids du boulot
(fallait tester toutes les titres sur Amiga et ST). Je prends sur moi de faire tout les tests et les articles de mon groupe.

Aller
chercher
les jeux dans les magasins (faire des courbettes pour obtenir les jeux
en prêt) ensuite les tester puis écrire les articles et prendre les
photos d'écran ça a l'air facile pour un jeu oui, mais plusieurs jeux
dans un temps limite (le bouclage) c'est le cauchemar des journalistes à la bourre. Je dors 4 heures par jour pendant 15 jours mais je finis ma
partie. Dès lors, je fait partie de la famille Tilt. Etant bilingue je
me retrouve, de fait, journaliste chargé des relations avec les éditeurs étrangers. Donc pigiste au départ, je passe rédacteur, chef de rubrique puis Reéac chef adjoint.

Quel souvenir majeur gardes tu de la période Tilt / Joystick ?

Dany Boolauck : Ouh la j'en ai plusieurs!

- La parution de mon premier article!
- Ma premiere émission micro kids (j'étais nerveux!)
- L'obtention de ma carte de Journaliste.
- La sortie du premier numero de Tilt que j'ai supervisé de A a Z dès mon premier mois en tant que Rédac'Chef a Tilt.
- Mon premier voyage aux USA pour le CES de Las Vegas.
- Ma visite des locaux de Lucasfilms et de Industrial Light & Magic (ILM).
- Voir Muhammed Ali en chair et en Os.
- Mes rencontres avec Roberta Williams et son mari Ken williams, Paul
Cuisset, Fréderick Raynal, Richard Garriott, Chris Roberts, Alexei
Pajitnoc, Jordan Mechner, Peter D. Molyneux, Brian Fargo, Brett Sperry,
Louis Castle et Robert Sirotek.
L'équipe de New World computing (Might and Magic), l'équipe de Faster Than Light FTL (Dungeon Master) et l'equipe Maxis (Sim city). Tout ces gens ont
"écrit" l'histoire du jeu video. Certains sont devenus des amis.

 

As tu gardé des contacts avec tes acolytes de l'époque ?

Dany Boolauck : Oui avec pas mal d'entre eux beaucoup d'anciens de Tilt et Delphine
Software et des créateurs de jeux célèbres comme Brian Fargo, Jordan
Mechner et Richard Garriott.


La fine équipe de Tilt avec de gauche à droite : Cedric Brisou, Ivan Roux,Jean Philippe Delalandre, Olivier Hautefeuille, Eric Caberia, Brigitte Soudakoff, Dany Boolauck, Jean Michel Blottiere, Denis Scherer, Jean loup Renault (moustaches), Anne Sophie Dreyfus,
Jacques Harbonn, Alain Huyghes Lacour.

Lis tu encore la presse vidéo ludique française aujourd'hui ou des sites spécialisés de façon régulière ?

Dany Boolauck : Oui, je suis l'acualite jeux sur les sites web anglais ou US et
français. Je m'interesse surtout aux previews. J'attends avec impatience Diablo III et Guild Wars 2 !!!

Tu trouves qu'il y a une
évolution dans la manière de traiter les jeux ou finalement cela n'a pas beaucoup changé depuis vingt ans (déjà !) ?

Dany Boolauck : Dans la presse ? Le changement majeur se trouve dans les rapports entre la
presse et les éditeurs et cela se ressent dans les articles. De nos
jours, il y a une distance entre journalistes et éditeurs et créateurs.
Les éditeurs ont des planning de sorties des jeux, suivent un plan
marketing qui s'étale sur plusieurs mois. Toute présentation ou info
soumise aux médias concernant un nouveau jeu est contrôlée. De fait,
tout le monde reçoit plus où moins le même communique de presse ou press kit. Tout est donc "aseptisé". Il est loin le temps où presque tous les éditeurs et les créateurs me laissaient des versions bêta (meme
pré-bêta) de leur nouveautés !!! Il faut dire que j'avais réussi a
établir un climat de confiance entre eux et moi.

Après Joystick, tu es allé chez Delphine software. Je crois me souvenir que tu étais admiratif du travail d'Eric Chahi.
Il me semble d'ailleurs que tu avais fait un sujet à ce propos dans Micro
Kids. Qu'est ce qui t'a décidé à sortir du journalisme spécialisé ?

Dany Boolauck : Après Joystick, je suis retourne chez Tilt avant de rejoindre
Delphine Software. L'aventure Delphine commence par Victor Perez PR de
Delphine, à l'époque, qui m'approche et me propose de rencontrer Paul de Senneville, patron de Delphine. J'hésite au debut mais comme il accepte mes conditions sans négocier, je ne peux pas refuser ! Eric Chahi ne
faisait plus partie de Delphine quand j'ai rejoint l'équipe.

Tu est donc devenu producteur exécutif chez Delphine et ensuite Adeline software. Quel est le rôle d'un producteur
exécutif ?

Dany Boolauck : C'est un rôle multi-tache. J'avais la responsabilité de la
localisation des produits New World Computing (Might and Magic). Je
participais dans les négociations de contrats et je faisais la liaison
entre les équipes créatrices et le commercial et marketing des licensees ou distributeurs. Je devais également inviter des créateursJà venir
rejoindre notre groupe. C'est ce que j'ai fait avec Adeline software.

Aujourd'hui tu t'occupes de distribuer des jeux pour la Thailande. Quels sont les jeux que tu distribues ?

Dany Boolauck : Aujourd'hui je distribue pour la thailande uniquement les jeux (PC ou PS3) Square Enix (just Cause et Kane and Lynch, Batman etc) et Namco
Bandai (Dragon Ball, Naruto, Enslaved, Ben 10 etc).

Que représente ce marché comparé au marché français et européen ?

Dany Boolauck : Il est comparable au marché francais et les pirates occupent 80% du marché.

A quoi ressemblent tes journées ? C'est un travail de bureau ou il y a encore du « terrain » ?

Dany Boolauck : En tant que distributeur c'est beaucoup de bureau (beaucoup de
téléphone) et un peu de terrain. Rien de vraiment spécial à dire car une journee de bureau ici c'est comme en France sauf qu'on a plus de soleil ici.

Est
ce que tu envisages d'écrire ou de réagir à nouveau sur l'actualité à
l'image d'AHL ou Cyril Drevet ou est ce que la page est définitivement
tournée ?

Dany Boolauck : Ecrire a nouveau ? Oui certainement mais encore faut-il que l'opportunité se présente et qu'elle me convienne.

Merci beaucoup Dany et au plaisir de te lire à nouveau si une belle opportunité se présente !

Article tiré du Blog Parallaxe