Est-ce qu'un jeu vidéo peut changer la vie ? Face à cette question philosophique, je vais tenter d'apporter mon modeste témoignage. Mais avant cela,petit retour en arrière...

Nous sommes en 1996, en automne. Pas à Paris mais à Artenay, fière bourgade de Beauce productrice de sucre et où résident mes grands-parents et mes oncle, tante et cousins. Nous sommes chez eux justement en ce dimanche après-midi et, Noël approchant, les catalogues de jouets des grandes surfaces s'empilent devant mes yeux ébahis. Il est temps de faire ma liste au Père Noël !

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Avec mon grand frère, nous sommes les heureux possesseurs d'une Playstation sortie un avant (cette console aura donné lieu à une chasse au cadeau épique et à des réprimandes paternelles virulentes lorsqu'il s'apercevra que nous avons non seulement trouvé mais ouvert et utilisé la console une semaine en avance... Mais c'est une autre histoire !). Je commence donc à compulser l'ensemble lorsque je tombe sur cette image :

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Encore aujourd'hui je ne sais pas vraiment pourquoi mais du haut de mes 10 ans je suis alors hypnotisé et je me tourne vers mon père et lui dit : "Je veux ça !". Je ne peux même pas lui répondre lorsqu’il me demande ce que c’est puisque je n’ai jamais entendu parler du jeu en question. Et pourtant je suis sûr de moi !

 

Soit, faisons un bond de quelques semaines dans le temps. Noël est passé, Georges Stobbart (avec deux B et deux T) m’attendait bien sagement au pied du sapin et je me lance dans l’aventure. Je passe sur le ravissement que me procure le titre : le style, l’humour si particulier à la série, la musique de Barrington Pheloung, les doublages (quand saura-t-on reconnaître en France le talent des comédiens de doublage qui nous font à quelques occasions préférer la VF à la VO ? Les Emmanuel Curtil en l’occurence, Patrick Poivey, Jacques Frantz ?). L’objet n’est pas ici de faire le test du jeu, et je serais bien en peine de le faire d’ailleurs (comment faire le test objectif d’une œuvre qu’on adore ?). Si vous connaissez bien Les Chevaliers de Baphomet, vous savez par quoi je suis passé : un clown meurtrier, des égoûts, l’hôtel Ubu et la découverte d’un manuscrit faisant référence à l’ordre des Templiers. Et c’est là que tout bascule !

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Nous sommes chez  moi et ma grand-mère nous rend visite. Après quatre appels à table de plus en plus irrités de ma mère, je consens enfin à quitter Georges pour rejoindre la famille. Je raconte alors ce qui me prenait autant de temps : les Templiers, le trésor, etc. Simplement pour moi il s’agissait d’une fiction, d’une aventure inventée de toutes pièces. Quand ma grand-mère m’explique que les Templiers ont bien existé, qu’ils ont été condamnés par Philippe IV le Bel, qu’ils auraient caché un trésor, etc, le jeu de Revolution Software prend une tout autre dimension pour moi. C’est à partir de là que j’ai commencé à dévorer tous les ouvrages sur les Templiers que je pouvais trouver. De livre en livre, mon intérêt s’est élargi à l’Histoire en général et j’en ai tout naturellement fait l’objet de mes études, puis mon métier (archiviste, pas historien, mais quand même).  

 

Je me demande souvent ce que j’aurais fait  si je n’étais pas tombé sur ce catalogue, si je n’avais pas connu Georges Stobbart, si je n’avais pas parlé de l’aventure à table et m’étais contenté de manger ma purée en silence. C’est peut-être ça le destin ? L’effet papillon ? On appellera cela comme on voudra mais en tous cas, je me souviendrai toujours des Chevaliers de Baphomet…