On connait l'intérêt des éditeurs : toucher de l'argent à chaque fois qu'un joueur rentre en possession d'un jeu, même quand il n'est pas neuf. On peut peut-être même trouver cela compréhensible (ou pas), dans un monde ou les coûts de développements sont devenus astronomiques. On connait moins l'intérêt des constructeurs, qui tourne lui autour des royalties et du contrôle du canal de vente.

Alors poussons la logique jusqu'au bout. Passons du fantasme à la réalité. Si j'étais Sonysoft et que je voulais tuer l'occasion, que devrais-je faire ? Et bien rien de sorcier. Je pourrais commencer immédiatement, et tuer 50% de l'occaz d'ici 3 ans. Sans même attendre une nouvelle génération de console.

Un plan sans accroc...

Le meilleur moyen de tuer l'occasion et de pousser le digital, qui ne peut pas se revendre. Alors allons-y. Les marketplaces permettent déjà d'acheter quelques jeux « en boite », seulement l'offre est volontairement très limitée. Alors commençons par mettre le prochain God of War et le prochain Halo téléchargeable en ligne. Pas exclusivement, mais en parallèle du circuit classique. Le téléchargement est long ? Donnons 5 jours d'avance au digital par rapport à la version boite. Pas de possibilité de le revendre ? Baissons le prix du digital de 10€. Techniquement, rien que les structures du Xbox Live et du PSN ne sachent déjà faire. Financièrement, plutôt plus de rentabilité car on évite la marge des revendeurs, supérieure aux 10 € de baisse de prix. Le cout des serveurs ? Comparable aux couts de pressage et de transport des jeux en boite.

Que pourrais faire les magasins ? Rien. Car la version boite existe également. Et qu'on ne boycotte pas un blockbuster. Les joueurs ? Ils seraient ravis d'avoir le choix, et de pouvoir payer une version digitale moins chère. Et ne sous estimons pas le pouvoir de la flemme. L'avantage pour les éditeurs ? La capacité de contrôler les baisses de prix dans le temps, et d'éviter le marché de l'occasion. L'avantage pour les constructeurs ? De fidéliser les joueurs à leur marché en ligne, et de fidéliser au-delà d'une génération de console.

Quelle serait la part entre le physique et le digitale ? Si on se base sur la dynamique actuelle du PSN/Live, probablement 25% des ventes en digitale assez vite sur un titre, puis une lente progression jusqu'à la majorité du marché.

Que des avantages. Pas de barrières techniques. Plus de rentabilité. Des joueurs heureux. Alors vient la vraie question : Pourquoi les constructeurs ne le font-ils pas ?

Magasins, je vous aime...

Parce que les constructeurs ont besoin des revendeurs. Surtout des gros. Pour pousser les produits. Pour expliquer les concepts. Plus que ça, pour pousser les consoles sans qui l'écosysteme ne tourne pas. Et dont la promotion est clé en début de nouvelle génération. Pour mettre en avant des titres que Madame Michu ne verrait jamais s'il n'était pas en tête de gondole. Parce que la « casualisation » et l'ouverture des marchés à de nouveaux joueurs, ça ne se fait pas sans les magasins et l'occasion.

 

Brider les consoles de nouvelles générations pour tuer le marché de l'occasion ? Un risque énorme. La Wii U ne le fera pas. Imaginons que Microsoft, qui sera le suivant à dégainer, le fasse : Sony aurait tellement beau jeu de ne pas le faire sur sa console, et de rafler ainsi le cœur (et les économies) des joueurs.

Alors oui, petit à petit le digital va prendre des parts de marché. Et ce sera forcément au détriment de l'occasion. Oui, les systèmes de passe en ligne risque de se multiplier, surtout pour les contenues multi-joueurs. Mais je ne pense pas que la mort de l'occasion soit programmée pour tout de suite. Ni pour la prochaine génération. Et probablement pas pour celle d'après. Et d'ici là le streaming aura réglé le problème...