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« Pourquoi le survival horror ne m'intéresse-t-il plus ? »

J'aime le survival horror. Mais, depuis des années, je n'y joue plus. Je n'y trouve plus mon compte.

Ce n'est pas l'orientation « action » qui me dérange en soi, mais l'absence de ce côté viscéral qui suintait par tous les pores du jeu et que je me plaisais à disséquer.

D'ailleurs, le cinéma actuel est aussi victime de cette tendance.

                         

                             Salut, petit ! Pourquoi tu me regardes comme ça ? 


Définition de l'horreur

L'horreur est une représentation détournée de nos peurs, une critique masquée de notre société. Ne vivons-nous pas dans un monde où la différence attire la crainte et le rejet ?

Un obèse n'est-il pas victime de moqueries ? Les lépreux ne sont-ils pas rejetés par leur communauté ?

À mon avis, c'est la peur de leur ressembler, d'être comme eux ou notre ignorance qui motivent notre attitude. Selon Stephen King, lorsque le spectateur va regarder un film d'épouvante, il le fait pour se rassurer, d'une certaine manière.

Nos angoisses les plus intimes y sont épluchées. Par exemple, les films de loup-garou jouent avec la peur de l'intérieur (nous-mêmes). Les adolescents y trouvent souvent leur compte, les transformations symbolisant la leur.

De plus, l'accumulation de films d'invasion martienne, dans les années 50, n'est pas anodine ; cette fois-ci, le mal vient de l'extérieur. La peur du nucléaire ne vous rappelle-t-elle rien ?

 

                                                 

                                                       Le syndrome Resident Evil !


Les limites du survival horror

Dans le jeu vidéo, on a eu deux écoles. D'un côté, Resident Evil peint la peur de l'extérieur (monstres, virus, etc.). De l'autre, Silent Hill s'intéresse aux traumatismes psychologiques et transforme la notion de cauchemar en un reflet de la réalité (peur de l'intérieur).

Dead Space n'exprime rien en moi. Ce n'est qu'un enchaînement de couloirs propices à des affrontements frénétiques. C'est très réducteur, je sais et c'est mon avis subjectif.

Bien sûr, je ne parle pas de sa capacité à faire peur (quoique limitée). Mais, je me concentre sur sa portée qui donne toute sa puissance ou non à une œuvre.

Un film comme Shining ne nous glace-t-il pas le sang ? N'esquisse-t-il pas la naissance de la folie, dans l'isolement ?

Ici, il n'y a pas de monstres repoussants ou autres zombies. Le jeu de lumière, la musique, l'ambiance font des merveilles, dans ce huis clos terrifiant.

Je ne dis pas que Stanley Kubrick a imaginé son film dans cette directive ou qu'il a délibérément glissé des symboles. Non ! Par contre, sa vision d'auteur se révèle intéressante, à plus d'un titre. 

Dans le jeu vidéo, ce n'est plus d'actualité. Alors qu'Alone in the Dark, Resident Evil, Project Zero ou les premiers Silent Hill étaient tirés vers le haut par la vision de leurs auteurs, aujourd'hui, je reste sur mes faims.

En voyant un jeu comme Resident Evil 5 ou Silent Hill Downpour, je suis sceptique. La magie ou l'équation a été perdue, distillée, au fil des années. On atteint un degré de manque d'expression effarant.

Aussi, je ne ressens plus de tension, de frissons. Avant, la difficulté était corsée, on ne vous faisait pas de cadeaux. Rien que l'idée de mourir vous terrifiait. Maintenant, t'es mort et tu reviens au dernier point de sauvegarde. Cool !

D'ailleurs, je n'éprouve plus de peur, mais du stress, oui. C'est le maximum d'intensité que peuvent atteindre les derniers titres. L'abondance d'ennemis peut faire stresser, mais n'atteint jamais des sommets.

                                                       Moi, puer de la gueule ?


Comment créer la peur ?

Je reprends l'idée d'une personnalité (dont j'ai oublié le nom) que ce qui nous fait peur, dans un film, c'est l'AVANT, la scène qui précède une surprise inattendue.

Et cette scène, perçue comme l'apogée, le summum de l'horreur, est souvent négligée. Dans Clock Tower, on flippe juste, en attendant l'arrivée du tueur aux ciseaux. Et surtout lorsqu'on entend les premières notes de musique...

Du sens est aussi important. On dit que les mécaniques du survival horror ont vieilli, comme ce fut le cas avec l'apparition de la 3D pour les point-and-click.

Mais, je trouve que c'est faux. D'ailleurs, je rêve d'un jeu à la Blair Witch, où on dirige un personnage avec une caméra et dans lequel un penchant pour l'exploration est de mise.

Avec du recul, la plus grande erreur des développeurs a été de faire du survival horror une sous-catégorie du TPS. Même Amnesia ne m'a pas si surpris que ça.

Certes, l'intention est louable, c'est lovecraftien à souhait. Mais, la mise en scène tapageuse fait perdre la magie et les effets utilisés à outrance cassent l'ambiance.

Et comme toujours, on s'oblige à ouvrir la porte.

La porte. C'est un élément caractéristique de l'horreur. Un exemple simple : dans une maison hantée, une chose habite, dans la chambre du premier étage. Elle laisse sur son passage un liquide gluant et visqueux...

J'ai entrouvert juste la porte ; mon choix a été de sous-entendre l'horreur, de la suggérer, sans jamais vous la montrer ou vous l'expliquer. On a toujours affaire à des affrontements dans les jeux vidéo ; or, on n'en a pas besoin pour faire peur.

Les nouvelles d'Edgar Allan Poe ou de Lovecraft brisent les interdits, jouent avec des questions délicates et laissent une empreinte indélébile au lecteur. Le contexte, bien sûr, y est pour quelque chose.

(Je recommande la lecture de Portrait ovale du premier auteur et Air froid du second. Ils sont, de surcroît, libres de droits !)

 

Une solution ?

L'histoire est aussi un élément important. C'est le squelette, la structure, le « justificatif » de notre expérience. L'histoire doit être racontée, non pas comme un film, via des cinématiques, mais dans le jeu lui-même.

Dans ce sens, il me semble nécessaire de créer nos propres codes. Au moins, nous sommes certains que cela va arriver, un jour.

D'ailleurs, on a une esquisse de la chose dans les Silent Hill où les jeux collectent une série d'informations sur le comportement du joueur, afin d'orienter le scénario d'une façon ou d'une autre.

Silent Hill : Shattered Memories établit un profil psychologique du joueur et adapte les dialogues, l'apparence des personnages rencontrés, en conséquence.

De façon plus subtile, on pourrait imaginer un jeu qui ajuste les monstres, en fonction des phobies du joueur.

Une petite anecdote : on dit que le jeu vidéo emprunte des éléments au cinéma. Dans un vieux film des années 70 ou 80, l'interactivité a été utilisée pour un effet plaisant. Comment ?

L'antagoniste tue ses victimes dans le noir. Pour l'éloigner, il faut crier. À la fin du film, il apparaît et on demande aux spectateurs de hurler. D'après mes souvenirs, la salle s'en est donné à cœur joie...

Enfin, bon ! Ce que les développeurs doivent comprendre est que la peur est une émotion intéressante et complexe à traiter. Le jeu d'épouvante doit être un jeu d'auteur avec une vision particulière (musicalement, visuellement, etc.).

C'est pourquoi, pour l'instant, je reste sur mes gardes, vis-à-vis des prochaines sorties de survival horror. Décidément, le traitement du genre n'est pas près de changer.

 

Comparaison musicale (qui résume l'article) :

Du metal dans du Silent Hill ? Ça me fait peur, au sens premier du terme. Akira !

VS

Cette chanson est un mélange de peur, de tristesse et de haine. Je l'écoute toujours, avant de m'endormir.


Et vous que pensez-vous du survival horror actuel ? Sinon, qu'en attendez-vous aujourd'hui ?


Voilà, ce fut une expérience enrichissante. Les 15 minutes m'ont permis de poser le squelette. Je me suis quand même permis 5 à 10 minutes pour relire et corriger le texte.